08 Avr Coronavirus : ‘L’Afrique, c’est la grande inconnue, mais je garde une forme d’espoir’ (JC Rufin)

Dans un entretien au quotidien Midi Libre, Jean-Christophe Rufin, en sa qualité de médecin et fort de sa connaissance de l’Afrique, constate que le continent, notamment dans sa partie équatoriale et tropicale, enregistre un nombre de contaminés et de décès, pour le moment, comparativement bas. Et il s’interroge sur les raisons, sachant que de grandes inconnues subsistent sur ce virus : quel est son écosystème ? Est-il saisonnier, sensible à la température ?

Il se pose donc la question sur son comportement en zone tropicale, avouant qu’à ce stade il « ne sait pas et que personne ne peut le dire ». Il observe cependant que l’Éthiopie, pays qu’il connait bien, « a gardé des relations aériennes avec la Chine très étroites et pourtant il n’y a quasiment pas de cas importés », alors qu’il est estimé que la forte propagation en Iran ou en Italie du nord est liée à une relation dense avec ce pays.

Autre observation encourageante, l’extrême jeunesse de la population africaine (41 % a moins de 15 ans) pourrait aussi constituer un rempart à l’explosion de l’épidémie, le Covid-19 touchant majoritairement des personnes âgées : 85% des décès constatés au 24 mars en France dans les seuls hôpitaux (hors maisons de retraite) concernent des personnes âgées de plus de 70 ans. En Afrique subsaharienne, l’espérance de vie reste, hélas, basse – 60 ans en moyenne (57% en Côte d’Ivoire) – et les vieilles personnes sont souvent, selon les habitudes, confinées, nombre d’entre elles regagnant au soir de leur vie ‘le village’, en situation donc de moindre contagiosité.

Ces notes d’espoir n’occultent pas son inquiétude : « Tout cela reste flou. Mais dans la pire des hypothèses, celle où les choses flamberaient en Afrique comme ici, il n’y a aucun moyen d’utiliser là-bas le confinement de façon efficace. Dans les banlieues de Kinshasa ou Lagos, je ne vois pas comment ils pourraient faire. »

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Jean-Christophe Rufin, médecin en neurologie, écrivain, élu en 2008 à l’Académie Française, fut un des pionniers de l’organisation humanitaire Médecins sans frontières puis président d’Action contre la faim. A ces titres, il a sillonné l’Afrique, notamment l’Éthiopie ; il a été ambassadeur de France au Sénégal et en Gambie de 2007 à 2010.

Source : Midi Libre, 5 avril 2020