La CAN, Coupe d’Afrique des Nations, en Côte d’Ivoire du 13 janvier au 11 février

Ce samedi 13 janvier débutent les compétitions de la CAN en Côte d’Ivoire. Le match d’ouverture opposera la sélection ivoirienne aux Bissau-Guinéens. A suivre en direct à partir de 21 h, heure de Paris, sur France24.com.

Pour la 2ème fois, depuis 1984, la Côte d’Ivoire accueille la phase finale de la CAN

L’accueil de la phase finale de la CAN, 34e édition de la plus grande des compétitions de football disputée sur le continent africain, est un évènement qui mobilise depuis des mois, voire plusieurs années, le pays entier où le football est le sport le plus populaire. D’autant que cet évènement ne se produit ici que pour la 2ème fois seulement de son histoire, la première voici près de 40 ans (1984), avec seulement 8 équipes,  et 12 ans après la décennie de crise qui avait divisé le pays en deux.

Plus d’un million et demi de visiteurs sont attendus. 5000 journalistes ont été accrédités, les matches seront diffusés dans 155 pays. Une vitrine exceptionnelle pour ce pays désormais en paix, à la croissance robuste qui vise l’émergence mais où le chemin reste long, plus d’un tiers de la population vivant encore sous le seuil de pauvreté et les jeunes toujours plus nombreux (76% au dessous de 35 ans) .

Pour être à la hauteur, des investissements massifs ont été consacrés en stades, axes routiers, centres hospitaliers, complexes hôteliers… Six stades seront utilisés dans cinq villes, dont deux à Abidjan. Une organisation complexe a été mise en place avec au centre, un comité d’organisation, le COCAN 2023, créé dès 2018 par décret présidentiel.

Au total, 1,5 milliard USD ont été dépensés dont les effets sont visibles en particulier dans la capitale économique Abidjan, en surchauffe avec ses quelque 7 millions d’habitants…

49ième au classement FIFA, la sélection ivoirienne rêve de l’emporter à domicile sur les favoris, Sénégal, Maroc, Nigeria, Algérie…

 

24 équipes en 6 groupes

 Les 24 équipes ont été réparties en six groupes de quatre équipes, la Côte d’Ivoire étant dans le groupe A aux côtés du Nigeria, triple champion, de la Guinée équatoriale et de la Guinée-Bissau.

Le groupe B contient également des poids lourds : l’Égypte de Mohamed Salah,  la plus titrée de l’histoire de la compétition, opposée au Ghana dont l’équipe est actuellement dirigée par l’ancien entraîneur de Newcastle et Brighton, Chris Hughton.

Au sein du groupe C, le Sénégal, tenant du titre, affrontera le Cameroun dans lors de l’un des premiers matches les plus attendus. Le Maroc, devenu la première équipe du continent à atteindre une demi-finale de Coupe du monde au Qatar en 2022, est la première nation africaine au classement mondial (13e) mais n’a pas remporté de Coupe des nations depuis 1976…

 

Une équipe ivoirienne, les « Éléphants », préparée et fortement motivée

Bien que modestement classée, la sélection ivoirienne, les « Éléphants », dirigée  depuis avril 2022 par le français Jean-Louis Gasset, ancien adjoint de Laurent Blanc chez les Bleus et au Paris SG, ne manque ni d’ambition ni de préparation. Le pays n’a plus gagné la CAN depuis 2015 qu’elle a remportée seulement 2 fois dans son histoire. L’équipe avait alors à sa tête un autre français, Hervé Renard, actuellement sélectionneur de l’équipe de France féminine.

 

Des investissements massifs en infrastructures de communication et en stades

De lourds investissements, d’une envergure sans précédent, notamment en infrastructures, ont donc été engagés pour un montant estimé à 1,5 milliard USD. représentant 6,4% du budget pour 2024, soit un montant égal à ceux de la Santé et de l’Education en 2023! Ils sont particulièrement visibles à Abidjan : nouveaux ponts, création et amélioration des voies rapides, échangeurs, tunnels, passerelles, poursuite du chantier du métro qui ne devrait cependant être opérationnel qu’en 2027-2028… Il est espéré que ces ouvrages majeurs contribueront, au-delà de l’accueil des visiteurs de la CAN et de la promotion de la Côte d’Ivoire, à faciliter la mobilité des habitants de cette capitale, déjà surpeuplée avec ses 7 millions d’habitants, soumise à une pression démographique constante qui ne décélère pas.

Le projet phare est la voie de contournement « Y4 », une autoroute à 4 voies de 27,5 km, offrant une alternative vitale aux usagers de plusieurs communes, Bingerville, Cocody et Abobo, reliant le boulevard Mitterrand à la route d’Alépé jusqu’à celle d’Adzopé. La mise en service provisoire de cette « Y4 » permettra aux spectateurs de se rendre aisément au stade emblématique Alassane Ouattara d’Ebimpé pendant la CAN.

Parmi les autres projets de taille visant à désengorger le trafic et améliorer les liaisons, on citera l’échangeur des voies de sorties Est d’Abidjan, le tunnel du rond-point de la mairie d’Abobo, et le fly-over du carrefour de Macaci.

Des six stades de la compétition, trois ont été construits pour cette CAN, en plus de celui d’Ebimpé, Abidjan, achevé en 2020 (60 000 places) : « Charles-Konan-Banny » à Yamoussoukro, « Amadou-Gon-Coulibaly » à Korhogo et « Laurent-Pokou » à San Pedro, tous d’une capacité de 20 000 places. Les stades « Félix-Houphouët-Boigny » à Abidjan et  « de la Paix » à Bouaké, tous deux de 40 000 places, ont été l’objet d’une rénovation d’ampleur.

 

Une solide organisation

Le comité d’organisation, COCAN 2023 a donc été créé en juin 2018 par décret du président de la République sur proposition de la Fédération Ivoirienne de Football (FIF) et du ministère des Sports. Il est présidé par François Albert Amichia, une personnalité de grande expérience, ancien Ministre des Sports et des Loisirs, ancien Ministre de la Ville, également nommé par décret.

Du côté de l’État lui-même, un comité interministériel a été mis en place, chargé de la réalisation des infrastructures. Présidé par le Premier ministre, il comprend, outre le ministre des sports qui en assure la vice-présidence, tous les ministères compétents, les présidents de la FIF et du COCAN. On observera que la nomination récente  (octobre 2023) du Premier ministre Robert Beugré Mambé, précédemment Gouverneur du District Autonome d’Abidjan, superviseur des Jeux de la Francophonie en 2017, aurait été décidée par le Président, pour assurer le meilleur déroulement de cette CAN.

Par ailleurs, aux  17 000 membres des forces de défense et de sécurité et 2500 recrues formées ad-hoc dans les écoles de police  associés à un impressionnant maillage de haute technologie, un programme d’accompagnement tout au long de la CAN a été organisé. Il est doté d’un budget de près de deux milliards de FCFA , lancé sur la base d’un système de bénévolat.  20 000 bénévoles dont l’âge varie entre 18 et 40 ans ont ainsi été sélectionnés par le ministère de la Promotion de la Jeunesse, de l’Insertion professionnelle et du Service civique parmi 44 000 postulants. S’ils ne percevront pas de salaire, ils bénéficieront de kits alimentaires pendant la CAN et recevront des pécules à la fin de la manifestation. Ils auront pour mission d’animer les stades et les villages CAN, de soutenir les équipes non ivoiriennes en compétition, d’animer les espaces de regroupement de supporters. Ils devront également assurer l’assainissement et la salubrité des villes, jouer le rôle de guides touristiques, d’animateurs culturels, etc.

10 000 d’entre eux seront déployés à Abidjan, 2 000 à Yamoussoukro, 2 000 à Korhogo, 2 000 à San-Pedro, 3 000 à Bouaké tandis que les 1 000 autres seront répartis dans les autres villes et villages CAN.

En plus de ces bénévoles, 10 000 volontaires ont été recrutés par le COCAN. Leur rôle sera d’accueillir et d’orienter les spectateurs, d’assister la presse et les journalistes, d’aider à l’organisation des matches et d’accompagner les joueurs. Ils travailleront au sein de 10 commissions, Sécurité, Finances, Santé, Organisation des compétitions, Billetterie, Logistique et transports, Marketing et hospitalité, et enfin Télécommunications et médias.

Des gains espérés

Au delà du résultat attendu mais par définition incertain de l‘équipe nationale, des emplois temporaires, des infrastructures qui resteront, des bénéfices politiques pour le gouvernement en place, la Côte d’Ivoire espère ainsi  promouvoir sa destination touristique encore comparativement peu connue par rapport à son potentiel qu’elle entend développer dans le cadre de son plan « Sublime Côte d’Ivoire ». Elle mise sur le gain d’expertise dans l’économie du sport en plein essor sur le continent et, plus largement, cherche à légitimer encore davantage sa réputation de pays phare d’Afrique de l’Ouest. En termes financiers, cette CAN « rapporterait » par l’activité générée quelque 500 millions d’euros, sachant que la répartition des bénéfices (droits marketing, billetterie) avantage largement la CAN,  sans compter le ralentissement de la vie économique pendant cette période.

Une présence française active

Au-delà de l’entraîneur et sélectionneur de l’équipe ivoirienne, Jean-Louis Gasset, la France est présente dans l’appellation même de l’évènement, la CAN TOTALENERGIES CÔTE D’IVOIRE 2023, depuis 2016, le groupe énergéticien tricolore en étant le sponsor.

Plusieurs entreprises françaises ont aussi œuvré dans les travaux d’infrastructures, tel le stade de Yamoussoukro ou le pont de Cocody : Sogea-Satom (Vinci), Egis, SCAU, Groupe Baudin Châteauneuf, Alcor, Razel-Bec CI (groupe Fayat)…. On ajoutera pour la communication, Publicis Africa et dans les boissons, Solibra (groupe Castel), en outre sponsor de la FIF.

Parmi elles, Gregori International (réhabilitation de sites) est intervenue en grande urgence alors que la pelouse du stade Alassane Ouattara d’Ebimpé, était noyée par un violent orage en septembre dernier. L’enjeu était de taille, cette enceinte de 60 000 places, vitrine du football ivoirien située dans la banlieue d’Abidjan, construite voici à peine 3 ans, en 2020, doit en effet abriter les cérémonies d’ouverture et de fermeture de la compétition, ainsi que dix rencontres dont la finale.

On notera la contribution financière de l’Agence française de développement (AFD) à hauteur de 500 millions de F CFA au budget du programme de bénévolat.

Enfin la France a  appuyé la Côte d’Ivoire dans la sécurisation de l’événement, en fournissant des moyens humains et matériels.

Après la CAN, une Coupe du monde ?

Portés par cette prestigieuse CAN et convaincus que les efforts déployés et les résultats mettront en lumière le pays, certains imaginent même la Côte d’Ivoire candidate à l’organisation d’une Coupe du monde. En co-organisation avec le Sénégal et un autre pays du continent…Un Mondial africain ? Sur le modèle de celui de 2026 (Mexique, USA, Canada) et de 2030 (Argentine, Uruguay, Maroc, Espagne, Portugal), après 2034 dont l’hôte devrait être Arabie Saoudite.

 

 

 

 

 

 

 

Jean Dollé, jean.dolle@cefice.org