L’OMS annonce l’éradication de la poliomyélite en Afrique, un de ses derniers bastions : une avancée précaire, hélas pas une victoire définitive

L’annonce de l’éradication de la poliomyélite en Afrique par l’OMS 

Le 25 août, l’OMS, par la voix de la présidente de sa Commission Afrique de certification de l’éradication de la poliomyélite, Rose Leke, affirmait que la « transmission du poliovirus sauvage avait été interrompue » sur le continent, une des dernières parties du monde encore affectées, 4 ans après les derniers cas enregistrés dans l’État de Borno au Nigéria et des efforts massifs de vaccination des enfants. La directrice Afrique de l’OMS, Matshidiso Moeti, évoquait en visioconférence « un moment historique pour l’Afrique ». Elle avait, à ses côtés, le directeur général de l’Organisation, l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, ainsi que les milliardaires philanthropes, le Nigérian Aliko Dangote et l’Américain Bill Gates.

On comprend l’opportunité de ce message d’espoir alors qu’un autre fléau, le COVID-19, avec ses graves conséquences économiques et sociales, concentre toutes les craintes, à l’échelle planétaire.

Selon l’OMS, la dernière poche de résistance était le Nord-Est du Nigéria où sévit la secte Boko Aram, qui soutient que le vaccin contre la polio résulte d’un complot occidental pour stériliser les musulmans… Toutefois l’OMS reconnaissait que quelque 30 000 enfants seraient toujours privés de vaccination dans des zones d’Afrique de l’Ouest entièrement contrôlées par les intégristes.

L’infirmation de cette bonne nouvelles quelques jours plus tard par l’ONU….

Cette nouvelle encourageante a hélas été infirmée quelques jours plus tard, le 28 août, par l’annonce par le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) que la polio avait refait son apparition au Soudan, après plus d’une décennie, avec la détection d’un premier cas le 9 août mais aussi en Éthiopie, en République centrafricaine et au Tchad.

La guerre contre ce virus n’est donc pas complètement gagnée. Sa propagation est attisée par la déstabilisation de nombreuses régions ou pays entiers, principalement africains et par l’effet d’éviction provoqué par le coronavirus. Ainsi le ministère de la santé soudanais, soutenu par l’UNICEF, l’OMS et le Programme Alimentaire Mondial (ONU), met en place une campagne de vaccination pour 5 millions d’enfants de moins de 5 ans mais doit mobiliser 20 millions USD…

Éradiquée presque partout dans le monde, elle est encore endémique, hors Afrique, en Afghanistan et au Pakistan

Hors Afrique et à l’exception de l’Afghanistan et du Pakistan où elle reste endémique, la polio a été éradiquée du monde, ceci grâce à un partenariat public-privé à l’échelle planétaire : http://polioeradication.org/. Elle était endémique pratiquement partout jusqu’à la découverte d’un vaccin dans les années 1950. En 1988, l’OMS dénombrait 350.000 cas à travers le monde dont encore plus de 70.000 dans la seule Afrique en 1996. Mais, grâce à une formidable prise de conscience collective et à d’importants efforts financiers (19 milliards de dollars sur 30 ans), seuls les quelques rares îlots cités ont subsisté.

Une maladie infectieuse qui touche principalement les jeunes enfants

On rappellera que, la poliomyélite, provoquée par le poliovirus sauvage, est une maladie infectieuse aiguë et contagieuse qui touche principalement les enfants, attaquant la moelle épinière et pouvant provoquer une paralysie irréversible. Au problème du virus sauvage s’en est substitué un autre : la circulation de virus vaccinaux (mutés). Les vaccins ont certes permis de diminuer de plus de 99 % les cas de paralysie, mais certains offrent une possibilité de seconde vie au virus, rendant plus difficile son éradication. Parmi les sujets paralysés, 5 à 10% meurent lorsque leurs muscles respiratoires cessent de fonctionner.

 

 

Situation de la polio dans le monde en 1988 et en 2018

 

 Sources: OMS, ONU, Centers for disease control and prevention,  Global Polio Eradication Initiative, AFP, Le Monde